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Cela fait longtemps que je souhaite lancer une discussion sur le sujet des espèces polymorphes, et des faux polymorphes, mais jusqu'aujourd'hui j'ai toujours différé, craignant d'une part que la discussion ne parte dans tous les sens (vue la multiplicité des facettes du sujet), et d'autre part d'être rapidement incapable de suivre, à cause du tour très technique que pourraient prendre les discussions. Mais finalement peu importe, donc je me lance.

 

Pour rappel, deux espèces minérales sont dites dimorphes, ou plusieurs espèces sont dites polymorphes lorsqu'elles partagent une même composition chimique, mais avec une structure moléculaire spatiale différente. Plusieurs exemples de polymorphisme nous sont plus ou moins familiers, comme par exemple, pour ne citer que les plus connus :

- le couple Calcite-Aragonite pour le carbonate de calcium (la Vatérite étant quant à elle moins connue);

- le triplet Rutile-Anatase-Brookite pour le dioxyde de titane (plus d'autres formes moins connues);

- le triplet Disthène-Andalousite-Sillimanite;

- le Quartz et sa dizaine d'espèces polymorphes plus ou moins rares.

 

Le phénomène de polymorphisme  est connu et étudié depuis 250 ans, avec une augmentation de la connaissance de type "boule de neige", caractéristique de la période moderne. En particulier, on connaît de mieux en mieux les conditions physico-chimiques et thermodynamiques et les contextes géologiques qui concourent à favoriser l'apparition de telle ou telle structure, pour une composition chimique donnée. Cependant - et fort heureusement pour les générations futures de chercheurs - la masse de connaissance accumulée reste ridicule devant la masse d'énigmes à résoudre. Quelques clairières ont été défrichées au milieu d'une immense forêt.

 

En ce qui concerne par exemple le carbonate de calcium, on sait que l'Aragonite est stable dans le domaine des hautes pressions et hautes températures, et métastable dans les conditions ambiantes de la surface terrestre (sa transformation en Calcite étant très lente à l'échelle du temps humain). Pour autant l'Aragonite n'est pas un minéral spécifique des roches métamorphiques: elle se forme naturellement dans des cavités karstiques et en néoformation dans les mines actuelles. Par ailleurs, elle est synthétisée par de nombreux êtres vivants pour constituer les coquilles et la nacre de certains mollusques et le squelette de certains coraux. J'ignore si l'on a élucidé le ou les paramètres qui favorisent l'apparition d'Aragonite dans les cavités karstiques et les mines. Idem pour les raisons expliquant le recours à l'Aragonite plutôt qu'à la Calcite pour la biosynthèse minérale de certaines espèces, et sur les paramètres du milieu qui orientent la synthèse du carbonate de calcium vers l'Aragonite.

 

 

Venons en maintenant aux "Kir-polymorphes", appellation toute personnelle que j'ai forgée - faute de mieux - pour désigner des espèces minérales dont la composition chimique est voisine (moins de 10% de différence en poids), et qui cristallisent de manière différente. D'où l'analogie - très bancale - avec le liquide obtenu en ajoutant 5 à 10% de crème de cassis dans de l'aligoté : du moins est-ce un hommage au divin chanoine.

 

Voici trois exemples de "Kir-dimorphes":

- Mélanophlogite et Quartz

- Hibonite et Corindon

- Vésuvianite et Grossulaire.

J'évoquerai plus tard les deux derniers exemples et les questionnements que j'ai à leur sujet, pour ne pas alourdir au-delà de toute mesure ce pavé déjà joufflu.

 

Mélanophlogite-Quartz:

 

En termes de composition chimique, une molécule de Mélanophlogite intègre, dans 46 molécules de Silice, quelques molécules organiques (azote, méthane, dioxyde de carbone, soufre), à raison de 6-10% en poids. Je précise immédiatement qu'il s'agit bien d'une espèce minéralogique à part entière, et non de Silice contenant des "impuretés". Elle est actuellement classée dans le groupe de la Silice, avec le Quartz et sa kyrielle de polymorphes, et l'Opale.

La Mélanophlogite cristallise dans le système quadratique, mais est pseudo-cubique en pratique. Elle forme des cristaux cubiques, mais également des "gouttes" ou des concrétions guttulaires comparable à la Calcédoine.

Elle est presque aussi dure que le Quartz (6,5-7), mais sensiblement moins dense (2-2,1 au lieu de 2,65) : l'intégration des éléments organiques dans la structure entraîne semble-t-il un foisonnement volumique.

De beaux spécimens ont été trouvés en France dans la Limagne, en particulier dans la mine des Rois de Dallet où l'on exploitait le bitume. 

 

Mes questionnements autour de la Mélanophlogite sont les suivants:

- Beaucoup de spécimens de Mélanophlogite sont en réalité des pseudomorphoses de Calcédoine après Mélanophlogite. Les éléments organiques sont partis: lessivés? évaporés? Ces éléments organiques auraient donc en quelque sorte joué le rôle de "catalyseur cristallographique", faisant bifurquer le dépôt de Silice vers la Mélanophlogite, puis disparaissant du milieu et ne laissant que de la Silice. Il serait intéressant de savoir si ces pseudomorphoses de Calcédoine après Mélanophlogite ont une densité plus proche de 2,1 ou de 2,6 (donc si le matériau a conservé la porosité de l'édifice cristallin initial, ou si un nouvel apport de Silice est venu imprégner la structure).

- Par ailleurs, est-ce que la présence de ces éléments organiques est suffisante pour orienter le dépôt de Silice vers la Mélanophlogite, ou bien d'autres conditions sont nécessaires: colonies bactériennes par exemple?

- Du coup est-ce que beaucoup plus de concrétions de Calcédoine qu'on ne le croit généralement auraient préalablement passé par le stade Mélanophlogite? Je pense notamment aux concrétions de Calcédoine présentes dans des nodules de silex qui fossilisent d'anciens êtres vivants (oursins par exemple).

- Cette notion de "catalyse cristallographique" par des composés organiques pourrait-elle éclairer l'apparition d'Aragonite dans la bio-synthèse, ainsi que dans les cavités karstiques (l'eau infiltrée dans les plateaux calcaires étant souvent enrichie en acide humique, entre autre)?

 

De quoi débattre donc, me semble-t-il.

 

 

 

Posté(e)

Oui, il y a de quoi débattre mais je ne pense pas avoir le niveau pour apporter du constructif.

Dans ce que j'ai pu retenir, il y a l'importance du couple pression / température mais aussi l'importance du bilan énergétique qui semble en relation avec l'épaisseur de la fente qui va influencer la vitesse de précipitation et qui va déterminer la séquence qui va apparaitre et là, je pense plus particulièrement aux secondaires de titane.

Parmi les points d'interrogation, sur cet échantillon récolté ce week-end (et je ne suis pas sur  que cela ait grand chose à voir avec ce qui précède), sur de la phillipsite, dans la même gerbe, j'ai des terminaisons standards et des terminaisons bowling avec cette question : Pourquoi ? (et je n'ai pas la réponse).

 

Phillipsite le Rozier FOV 6 mm 001.jpg

Posté(e)
Il y a 3 heures, me262 a dit :

Oui, il y a de quoi débattre mais je ne pense pas avoir le niveau pour apporter du constructif.

 

J'ai le même souci : ces questions m'intéressent, mais je crains de ne pas être suffisamment armé scientifiquement pour comprendre les explications ou les hypothèses explicatives. Mais même sans comprendre tout dans le détail, c'est intéressant d'avoir des pistes.

 

 

Il y a 3 heures, me262 a dit :

Parmi les points d'interrogation, sur cet échantillon récolté ce week-end (et je ne suis pas sur  que cela ait grand chose à voir avec ce qui précède), sur de la phillipsite, dans la même gerbe, j'ai des terminaisons standards et des terminaisons bowling avec cette question : Pourquoi ? (et je n'ai pas la réponse).

En fait cela déplace la question, en restant dans le même genre d'interrogations:

- au lieu de : "qu'est-ce qui oriente la cristallisation d'une substance chimique donnée vers telle ou telle structure moléculaire spatiale ?"

- on passe à : "pour une structure moléculaire spatiale donnée, qu'est-ce qui oriente la cristallisation vers tel ou tel habitus?", et : "pourquoi deux habitus différents se manifestent à l'échelle du centimètre carré?"

Posté(e)

Merci pour cette splendide photo, Laurent.

La coexistence de plusieurs formes cristallines (habitus) d'un même minéral et formées dans la même soupe est bien connue des expérimentateurs. Comprise, c'est une autre affaire.

 

Merci But pour ce sujet. D'abord, je découvre l'existence de cette MLP (j'en étais resté à la kyrielle d'opales, calcédoines, etc...) : un clathrate Si, avec la multiplicité de structures et de remplissages des cages possibles, ça meuble considérablement le paysage. Et ça fait un écho bienvenu à un problème sur lequel je planche actuellement, qui est d'interpréter les étranges textures de silicification observées dans un bois fossile Oligocene dans les évaporites de Malvesi (11). J'y vois des calcédoines optiquement anormales et une organisation des cristaux de quartz diagénétiques dont je soupçonne qu'elles sont liées a un minéral précurseur style opale-CT voire MPL, maintenant que je sais que cela existe. J'y reviendrai en photos.

 

Concernant la partie "théorique" du sujet, à savoir s'il y aurait un intérêt conceptuel à définir des "kir-PM", i.e. des minéraux de composition proche d'un solide de composition fixe sans être des solutions solides de ce solide, je crois bien que sans être formulé ainsi, c'est un peu ce que l'on fait pour les hydrates de gaz. Ces hydrates (clathrates) intéressent beaucoup l'industrie, notamment pour les procédés de séparation des gaz. Les chercheurs ont pris l'habitude de les représenter comme de solutions solides dans laquelle le "solvant" est une glace (solide) à structure hydrate mais avec des cages vides, et les solutés sont les différents gaz que l'on peut caser dans ces cages. Toute la beauté du truc, comme souvent en thermodynamique, c'est de définir comme "état standard" (terme consacré) un solide qui n'existe pas, et s'en servir pour décrire les propriétés énergétiques des variantes chimiques de ce solide qui existent réellement.

Posté(e)
il y a 26 minutes, BUT a dit :

En fait cela déplace la question, en restant dans le même genre d'interrogations:

- au lieu de : "qu'est-ce qui oriente la cristallisation d'une substance chimique donnée vers telle ou telle structure moléculaire spatiale ?"

- on passe à : "pour une structure moléculaire spatiale donnée, qu'est-ce qui oriente la cristallisation vers tel ou tel habitus?", et : "pourquoi deux habitus différents se manifestent à l'échelle du centimètre carré?"

Ce sont des questions que se posent tous les jours ceux qui font de la cristallisation industrielle, à commencer par les pharmaciens.

La première renvoie a une approche thermodynamique : propriétés énergétiques du solide, stabilité des polymorphes, systèmes a l'équilibre et règle des phases.

La deuxième est plutôt le job des cinéticiens : qu'est-ce qui se passe dans la croissance ? comment ça s'empile ? quelles sont les réactions élémentaires en surface d'un solide qui croit ? catalyse et empoisonnement des surfaces.

Il existe un troisième aspect sur lequel les recherches sont encore moins abouties : la nucléation. Problème d'autant plus difficile que l'on ne peut pas observer ce qui se passe, contrairement à la croissance cristalline ou l'on sait le faire. On invoque toujours la difficulté de nucléation pour expliquer la formation d'une phase métastable au labo (vatérite a la place de la calcite, opale à la place du quartz, etc...) mais c'est un peu trop "ad hoc" pour être satisfaisant.

Pour tous ces aspects, la science "ancienne" (celle de mon époque) a une approche plutôt macroscopique ; la tendance actuelle est d'aller vers la simulation ab initio : on prend les atomes dans la soupe et on regarde leurs interactions deux a deux quand on assemble le solide... Tout un art, que je ne maitrise absolument pas.

Posté(e)
Il y a 11 heures, phoscorite a dit :

Merci But pour ce sujet. D'abord, je découvre l'existence de cette MLP (j'en étais resté à la kyrielle d'opales, calcédoines, etc...) : un clathrate Si, avec la multiplicité de structures et de remplissages des cages possibles, ça meuble considérablement le paysage. Et ça fait un écho bienvenu à un problème sur lequel je planche actuellement, qui est d'interpréter les étranges textures de silicification observées dans un bois fossile Oligocene dans les évaporites de Malvesi (11). J'y vois des calcédoines optiquement anormales et une organisation des cristaux de quartz diagénétiques dont je soupçonne qu'elles sont liées a un minéral précurseur style opale-CT voire MPL, maintenant que je sais que cela existe. J'y reviendrai en photos.

 

La Mélanophlogite est rare, mais bien ancrée dans le patrimoine minéralogique français et italien. Rémi Bornet a publié la photo d'un joli spécimen limagnol dans Mindat (en fait c'est une PSM de Calcédoine après Mélanophlogite, mais la forme cristalline reste). Otto également dans le sujet "Minéraux Auvergne - Puy de Dôme", et Simpson dans le sujet "Ma collection de minéraux".

 

Pour information, il existe deux autres clathrasils naturels : la Chibaïte (cubique) et la Bosoïte (hexagonale). Ce sont des raretés japonaises trouvées assez récemment dans la péninsule de Boso, en face de Tokyo de l'autre côté de la baie. Pour que la fête soit complète, la Bosoïte forme de belles épitaxies sur la Chibaïte, ce qui met en délire les afficionados; mais cela ne fait pas beaucoup de bruit parce qu'ils sont à peu près aussi nombreux que les clients d'un restaurant vegane au Texas...

Serait-il légitime de considérer ces clathrasils naturels comme des "cages zéolites" avec un ratio Al/Si = 0 ? Je sais que depuis une trentaine d'année les chercheurs ont été capables de synthétiser des "cages zéolites" avec 100% de silice; mais je ne sais pas à quoi cela ressemble.

 

Vos interrogations sur un minéral précurseur de la Calcédoine dans un bois fossile rejoignent mes spéculations (rêveries), totalement protoscientifiques, sur un possible stade antérieur mélanophlogistique de certains fossiles calcédonieux. Je suis donc fort intéressé par les arguments qui vous poussent à envisager un autre minéral précurseur, plutôt qu'une minéralisation directement calcédonieuse. Mais je crains d'être rapidement largué!

Posté(e)
Il y a 3 heures, BUT a dit :

Serait-il légitime de considérer ces clathrasils naturels comme des "cages zéolites" avec un ratio Al/Si = 0 ?

Légitime, pour qui ? Si cela conduit a en simplifier la description thermodynamique, et a englober les deux types dans un même modèle, cela peut se justifier.

Je ne connais pas assez les zéolites pour répondre, mais la question pour moi se résume a ceci : est-ce que pour décrire les variations de composition connues des zeolites on a besoin d'introduire un pole pur de type clathrasil ? ou, réciproquement, est-ce que Al peut entrer (un peu) dans la structure clathrasil ?

 

Il y a 3 heures, BUT a dit :

les arguments qui vous poussent à envisager un autre minéral précurseur

A ce stade, ce sont des observations en lame mince, donc en 2D, et beaucoup de questions sans réponse. 

Je vais essayer d'illustrer, le temps que je structure un peu le discours, sinon c'est trop rasoir.

Posté(e)

Très juste. Un cas de cristallisation de minéral métastable interprété comme une difficulté de nucléation de la phase stable. Je n'ai aucune autre interprétation a proposer, mais ce je ne trouve pas trop satisfaisant, c'est que cette approche ne prédit pas ce qui va se passer, elle explique juste pourquoi la calcite ne précipite pas. Au labo, quand on fait précipiter un carbonate, c'est souvent la vatérite que l'on obtient, et on conclut que l'aragonite a, elle aussi, des difficultés a nucléer... Je n'ai pas bossé sur ce sujet depuis une quinzaine d'années, et ma biblio date, mais je n'ai encore jamais vu de théorie prédictive sur la nucléation.

Posté(e)

La question a une certaine importance en métallurgie. Je pense à quelques exemples mais je ne connais pas de théorie générale. J'ai plutôt l'impression qu’on peut avoir affaire à plusieurs mécanismes différents.

 

Posté(e)

Rebonjour

Je repars sur le sujet des clathrasils de manière détournée, car si on doit discuter de calcédoine en lame mince, il vaut peut-être mieux que je montre d'abord ce que le microscope optique permet de voir sur une calcédoine "normale". Je prends un exemple dans une vérite de la province d'Alméria (Espagne). C'est une roche volcanique basique ultrapotassique ; il y a des phénocristaux d'olivine (calcitisés), des microphénocristaux de phlogopite (biotite très magnésienne) et des microlithes de pyroxene (probablement enstatite) dans une pâte vitreuse rosée sur la photo ; fov (2 x 5 mm)

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Ce sont les vésicules de cette lave qui contiennent de la calcédoine. Elle forme une chemise en couronne des vésicules, le centre étant occupé par de la calcite le plus souvent. La calcédoine (gris à noir en LPA) forme des fibres centripètes, régulières ou avec des éventails. fov 0.2-0.4mm

VE3_2LN.thumb.jpg.2f34f8346850a4061f9a2b4bb6737435.jpgVE3_2LP.thumb.jpg.5f1f9365b6e354a26b17b5cdc01eeedf.jpg

 

 

La microscopie optique permet aussi de donner l'orientation des axes optiques (leur projection sur le plan de coupe plus exactement). 

Quand on fait tourner la platine en LPA, on obtient les positions d'extinction du minéral.

 

Ici, l'extinction est droite, les fibres orientées NS ou EW sont noires en LPA, et quand la platine tourne, les autres fibres de calcédoine deviennent noires quand elles s'orientent NS ou EW, ce qui donne cette impression de roulement dans les éventails.

Moyennant une lame additionnelle, la microscopie permet en outre, dans cette position d'extinction, de savoir si c'est le grand axe ou le petit axe de l'ellipsoide des indices qui est NS, l'autre étant EW. Ici, les fibres de calcédoine ont un allongement négatif ce qui veut dire en clair que l'indice de réfraction le plus le plus fort est normal aux fibres, comme sur la figure 82-1 de la planche ci-dessous pour la calcédoine s.s. 

Troger1b.thumb.jpg.149b033fa2109703e3b61d1f431f7cac.jpg

 

C'est l'autre variété de calcédoine, dite "quartzine", à allongement positif, que l'on trouvera dans les évaporites du gisement de Malvesi (11).

 

 

 

 

Posté(e)
Il y a 8 heures, mr42 a dit :

Bonjour à tous,

une discussion sur l’aragonite et la calcite il y a quelques années :

https://www.geoforum.fr/topic/25686-l-aragonite-comment-se-forme-t-elle/page/2/#comment-622066

Merci mr42.

L'article est en plein dans le sujet, mais sa lecture promet d'être ardue pour moi. Je pense que j'arriverai tout de même à saisir l'essentiel.

 

Il y a 5 heures, mr42 a dit :

La question a une certaine importance en métallurgie. Je pense à quelques exemples mais je ne connais pas de théorie générale. J'ai plutôt l'impression qu’on peut avoir affaire à plusieurs mécanismes différents.

 

En effet et cette discussion d'il y a quelques années a le mérite de montrer la multiplicité des problématiques, et la possibilité de causes diverses à la production d'Aragonite.

 

Par exemple : le fait que certains mollusques soient capables de produire concurremment Aragonite et Calcite pour différentes parties de leur coquille.

 

Autre exemple: l'influence du strontium.

Dès le 19ème siècle certains savants avaient invoqué la présence de strontium dans certaines Aragonites comme cause possible de la bifurcation vers le système orthorhombique. Ils avaient été rapidement réfutés par la découverte d'Aragonite constituée de carbonate de calcium très pur.

Cependant au 20ème siècle, avec la description des structures moléculaires spatiales de minéraux de plus en plus nombreux, et suite à la généralisation du concept d'isomorphisme, nos anciens ont rapidement établi que :

- les carbonates rhomboédriques (groupe de la Calcite) sont tous isomorphes entre eux et correspondent à des métaux dont l'atome est de "petite" taille (Fe, Zn, Mn, Mg), le calcium étant le plus gros de la série;

- les carbonates orthorhombiques (groupe de l'Aragonite) correspondent à des métaux avec de "gros" atomes (Pb, Sr, Ba), le calcium étant le plus petit de la série.

Ils ont fait le lien avec le fait que le site d'hébergement du cation métallique est plus grand dans la structure moléculaire orthorhombique que dans la structure rhomboédrique, et donc plus adapté à l'hébergement de gros cations. Le carbonate de calcium doit sa présence dans les deux séries à sa taille "moyenne", compatible avec les deux structures moléculaires.

 

Par conséquent, d'un point de vue heuristique, "on sent bien" qu'un cristal de "strontio-calcite rhomboédrique" avec 10% de cations strontium ne serait pas viable, du fait de la trop grande proportion de trop gros atomes dans la trop petite cage de la structure rhomboédrique.

 

En outre, il n'est pas certain que le pourcentage de strontium global dans l'ensemble du cristal soit un paramètre pertinent. En effet, même dans le cas d'un très faible ratio Sr/Ca, si l'on imagine que - pour telle ou telle raison inconnue de nous - le germe initial des cristaux soit constitué de strontianite orthorhombique, on pourrait concevoir que la cristallisation continue ensuite dans le système orthorhombique, par "effet de matrice" (une sorte d'"homo-épitaxie"). A ce stade je suis bien conscient de m'aventurer dans des spéculations hasardeuses, mais je ne suis pas convaincu que la question de l'influence du strontium (et du baryum) ait été étudiée à fond.

 

 

 

Il y a 4 heures, phoscorite a dit :

Rebonjour

Je repars sur le sujet des clathrasils de manière détournée, car si on doit discuter de calcédoine en lame mince, il vaut peut-être mieux que je montre d'abord ce que le microscope optique permet de voir sur une calcédoine "normale".

(...)

La microscopie optique permet aussi de donner l'orientation des axes optiques (leur projection sur le plan de coupe plus exactement). 

Ici, l'extinction est droite, les fibres orientées NS ou EW sont noires en LPA, et quand la platine tourne, les autres fibres de calcédoine deviennent noires quand elles s'orientent NS ou EW, ce qui donne cette impression de roulement dans les éventails.

Moyennant une lame additionnelle, la microscopie permet en outre, dans cette position d'extinction, de savoir si c'est le grand axe ou le petit axe de l'ellipsoide des indices qui est NS, l'autre étant EW. Ici, les fibres de calcédoine ont un allongement négatif ce qui veut dire en clair que l'indice de réfraction le plus le plus fort est normal aux fibres, comme sur la figure 82-1 de la planche ci-dessous pour la calcédoine s.s. 

C'est l'autre variété de calcédoine, dite "quartzine", à allongement positif, que l'on trouvera dans les évaporites du gisement de Malvesi (11).

Merci pour vos efforts de vulgarisation. Jusqu'ici je suis.

Posté(e)

Je passe maintenant aux calcédoines pas standard des évaporites de Malvesi (11).

J'ai en gros trois facies qui en contiennent :

- des laminations gypseuses silicifiées, dans lesquelles on a des sphérulites millimétriques sporadiques, un peu zonées :

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- des bourgeons de calcédoine en remplacement partiel de cristaux de gypse cassés dans les faciès détritiques

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et enfin un gros échantillon de bois silicifié dans lequel les fentes de retrait ont été remplies de gypse, lequel gypse est a son tour remplacé par de la silice (calcedoine et quartz) barre d'echelle 1cm

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La silice progresse à partit des bords de la fente, le gypse reste en reliques

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Posté(e)

Au menu du jour, sphérulites et bourgeons de calcédoine de Malvesi.

En voici dans leur jus, dans une roche ou alternent les niveaux silteux et gréseux à fragments de gypse. LPA fov 4*12 et 4*6 mm

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On discerne des structures radiées à contour un peu indenté comme dans un nodule de marcassite.

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Le cœur, quand je le vois, est très finement engrené, grains trop petits pour exploiter les orientations, mais collectivement ça a l'air isotrope.

Les rayons (tranches) n'ont pas une extinction uniforme, mais s'éteignent par plages dont l'orientation varie du cœur vers le bord de la structure.

Comme toutes les formes de silice fibreuse ont une extinction droite (en principe ?), j'en conclus que ce que je vois ne sont pas les fibres mais des petits paquets de fibres (des fuseaux si on veut) dans lesquels l'orientation réelle des fibres est transverse par rapport à l'orientation apparente du paquet (fuseau). Bref, dans la structure (macroscopique) qui est radiée, il y a une sous-structure (plus fine) en zig-zag.

Avec la lame additionnelle, on voit un peu mieux ce patchwork :

 

On voit aussi un peu mieux, les zones de croissance en sphères indentées, qui sont bien concentriques avec l'enveloppe externe de la sphérulite.

 

 

 

Posté(e)

Passons aux bourgeons.

Contrairement aux sphérulites, qui croissent dans une matrice fine et globalement isotrope, les bourgeons de calcédoine croissent dans des cristaux de gypse macroscopiques (pas isotropes) ;  les formes externes sont arborescentes. fov 4-8mm, LPA

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Le gypse est en bas (gris uniforme avec clivages) ; il y a en haut des cristaux de S natif (tres sombre) qui remplace partiellement le gypse avant la formation de la calcédoine. On commence a voir une structure en treillis dans la calcédoine (détail 0.4-0.6mm).

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Un détail dans lequel on voit le treillis (LPA) et la différence de relief marquée entre la calcédoine et le gypse (LPNA) fov 1mm

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Même observation dans un autre bourgeon, développé dans un autre groupe de cristaux de gypse à coté. fov 3-5mm, puis détail.

Il y a aussi des cristaux de S natif en périphérie du gypse.

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L’enchevêtrement des orientations est assez évident, et il y a une organisation dans cette sous-structure.

Toute la question est : quelle symétrie pour cette sous-structure ? Il me parait assez clair que :

- les orientations des fibres n'ont rien a voir avec la morphologie externe du bourgeon (plutôt champignonneux ici)

- rien à voir non plus avec l'orientation du gypse hôte, puisque ici il y a en fait deux cristaux de gypse orientés différemment (l'un est gris l'autre presque noir en LPA)

 

Un dernier exemple a morphologie plumeuse, qui rappelle un peu des dendrites. fov 2*3mm.

Le cœur du bourgeon est occupé par une impureté (indéterminée) qui a manifestement servi de germe.

Mv13_5LN.thumb.jpg.08f9068b5f848667de5a3d93bbe18be6.jpgMv13_5LP.thumb.jpg.2a88bd3218afb647fb76a54d4ed27d3b.jpg

 

On passera ensuite au bois fossile, mais pas tout de suite, obligations domestiques...

 

 

 

Posté(e)

Magnifiques images.

Pour les sphérules on distingue parfaitement la structure radiale en patchwork Arlequin, et la structure à indentations concentriques.

Idem pour les bourgeons, plumes et treillis apparaissent très clairement.

Posté(e)
Il y a 3 heures, BUT a dit :

Magnifiques images.

Pour les sphérules on distingue parfaitement la structure radiale en patchwork Arlequin, et la structure à indentations concentriques.

Idem pour les bourgeons, plumes et treillis apparaissent très clairement.

Merci. En fait, c'est l'absence de relation évidente entre la microstructure interne (a symétrie cristalline) et les formes externes du bourgeon (les formes de croissance centripète) qui me fait penser que la première est héritée d'un précurseur, par murissement. C'est un peu tiré par les fibres, je le reconnais volontiers.

 

Ci-après, un autre cas de bourgeon avec une zonation (cœur presque isotrope, bordure ramifiée). fov 2*3 mm, LPNA, puis LPA

Mv7_6LN.thumb.jpg.8ca1d0b9c69af67cc1667755b6214025.jpgMv7_6LP.thumb.jpg.f50e25a26c95eac8b8e58b1caad9f318.jpg

 

Ce qui est interessant, ici, c'est qu'il y a une différence d'indice assez nette (pas forcément nette sur la photo) entre le cœur et la couronne du bourgeon. L'indice (le relief) du cœur est plus bas, ce qui serait cohérent avec un couple opale/calcédoine ou bien calcédoine/quartz.

 

 

 

Posté(e)
Il y a 1 heure, Aldebaran66 a dit :

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Moi devant ce post :rolleyes:

 

Ouais, nous pourrions demander au collègue le sablais de rebaptiser ce sujet :

"La Silice en folie"

ou : "La Silice dans tous ses états"

ou encore: "La Silice salace"...

 

 

Posté(e)
il y a 35 minutes, phoscorite a dit :

Merci. En fait, c'est l'absence de relation évidente entre la microstructure interne (a symétrie cristalline) et les formes externes du bourgeon (les formes de croissance centripète) qui me fait penser que la première est héritée d'un précurseur, par murissement. C'est un peu tiré par les fibres, je le reconnais volontiers.

 

 

Pas tant que cela; mais je suis mauvais juge. Evidemment, c'est un peu frustrant d'avoir seulement des coupes 2D pour se faire un idée.

 

En ce qui concerne les sphérules, la structure des indentations concentriques fait penser à l'habitus en globules à écailles cubiques (rappelant un litchi), qu'on voit sur les célèbres Mélanophlogites de Fortullino en Toscane. 

Posté(e)

Initialement, j'avais pensé à la structure de l'opale CT, mais c'est brosser le poil dans le même sens. La mélanophlogite est bien plus sexy.

On reverra des structures a relents cubiques dans le dernier exemple, le bois fossile.

Posté(e)

On en arrive aux cristallisations dans le bois fossile (Oligocene de Malvesi)

C'est compliqué parce qu'il y a une succession d'etapes de cristallisation, comme dans une fissure ou une geode, dans lesquelles alternent la calcédoine et le quartz.

La matrice ligneuse elle-même est silicifiée, mais c'est trop petit pour l'optique. On reconnait bien la structure du bois. fov 5*8mm

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Ce qui nous concerne, c'est le remplissage des grosses fentes de retrait centimétriques dans ce tronc.

Initialement, ces fentes ont été remplies de gypse précipité (on est dans une série d'évaporites), puis le gypse est partiellement remplacé par de la silice, comme dans le cas des bourgeons.

Le remplissage est multiphasé, avec plusieurs stades de dépot de silice, les premiers (probablement calcédoine) avec des formes un peu étranges (style corail, demi sphérulite, rosace à secteurs), les plus récents, au contact du gypse résiduel, sous formes de palissades de quartz.

Mv22_10LP.thumb.jpg.9cb96a90d2e012c3d05f1fc3c5de5665.jpgMv22_17LP.thumb.jpg.b9485275259f01205a50ec309d247695.jpg

 

 

 

Posté(e)

Quelques détails sur ces calcédoines : une forme de corail :

 

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Dans le cœur de la structure l'extinction est droite cette fois, mais les orientations optiques se mettent a diverger dans les "cheveux"

 

Ici, un autre détail dans lequel on voit bien la structure en treillis, mais les orientations optiques varient par secteurs. L'usage de la lame additionnelle est ici précieux, parce qu'il permet de distinguer les orientations, alors que tout est du même gris en LPA.

Mv22_18LP.thumb.jpg.6225bb3169492632b40a2b72649c9330.jpgMv22_18LPts.thumb.jpg.15434baa07b2253a1bb46bdc4a3e39f3.jpg

 

 

 

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