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Les scories métallurgiques


mr42

Messages recommandés

Elles reviennent régulièrement dans nos discussions et soulèvent toujours les mêmes questions.

Plutôt que de les découvrir au hasard des discussions, je propose d’aller les chercher sur leurs lieux de production, les sites métallurgiques actuels ou anciens et de faire une revue de qu’on peut y trouver. Ça devrait aider les identifications à venir.

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Première étape en Lorraine.

Les hauts-fourneaux sont aujourd’hui presque tous éteints, ici Uckange avec le U4 conservé comme une cathédrale.

 

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Ils ont produit des millions de tonnes de tonnes de laitier.

C’est facile à trouver, il y en a un peu partout. Il est en revanche difficile de deviner où et quand ils ont été produits.

Le laitier de haut-fourneau se présente un peu comme unes roche de couleur gris clair. Les bulles sont fréquentes mais pas obligatoires. Le mot « laitier » rappelle leur couleur généralement claire liée à une très faible teneur en fer.

 

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Après avoir traîné quelques années, la surface est bien altérée, quelques coups de masse s’imposent.

Voici ce que ça donne sur cassure fraîche :

 

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Les bulles sont rarement vides

 

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La cassure est parfois irrégulière, parfois vitreuse.

 

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La pâte renferme des cristaux à section carrée ou rectangulaire : mélilite ?

 

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Wollastonite ?

 

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Pyroxène ?

 

 

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Les effets magnétiques sont généralement faibles ou nuls. On peut cependant tomber sur des inclusions fortement magnétiques.

Sur cette zone foncée, un aimant reste accroché. La partie gris sombre présente une résistance électrique de quelques kilo-ohms. La couleur rouille, typique du fer à l’état d’oxydation +3 ne vient pas du haut-fourneau. Probablement une particule métallique qui a été prise dans le laitier au cours du refroidissement.

 

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La dureté est généralement proche du verre, parfois un peu plus, parfois un peu moins.

La densité n’est pas très significative compte tenu des bulles : autour de 2,3 pour les moins poreux.

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Très bonne idée. J'ai toujours cette fascination pour toutes ces architectures de métal ou tant d'hommes ont laissé une partie de leur vie.

 

On dirait - la nuit - de vieux châteaux forts
Bouffés par les ronces - le gel et la mort
Un grand vent glacial fait grincer les dents
Monstre de métal qui va dérivant
 
Les Mains d'Or, B. Lavilliers
 
Serge
 
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« Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau ». Phrase du philosophe grec Anaxagore.

Aujourd'hui plus connue sous la maxime de Lavoisier: "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme"

 

Les laitiers, issus des grands centres de la sidérurgie, de part leur composition et leur utilisation, sont disséminés un peu partout (mais dommage, ils ne sont pas tombés du ciel, tout au plus de la gueule d'un vieux convertisseur Bessemer).

https://fr.wikipedia.org/wiki/Laitier_(métallurgie)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Scorie

 

Compte tenu de la composition de ses laitiers, on comprend mieux les photos que nous montre mr42. Super pour les amoureux de la micro, si tout n'a pas encore été détruit, ils peuvent sauter sur les terrils.

Mais que de chemin parcouru, depuis le jour où ils ont été arrachés de leur mine avec leurs copains métaux, et aujourd'hui ramassés par un p'tit curieux au détour d'une randonnée,...

Imaginez, rien qu'en France, la distance qu'il est possible de faire faire à un petit morceau de silicate contenu dans un minerai fer.

 

Sacha16

 

 

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Quelques explications sur la composition chimique des laitiers.

Le but du haut-fourneau est de récupérer le fer sous forme de fonte.

Les matériaux inutiles (les stériles du minerai, les cendres du charbon) se retrouvent dans le laitier.

Ces matériaux doivent être extraits à l’état liquide. La composition chimique est ajustée pour obtenir une température de fusion pas trop élevée. Le principal constituant naturel est la silice que l’on complète par des additions de calcaire.

Les principaux constituants du laitier sont alors la silice, la chaux, l’alumine et la magnésie avec quelquefois des oxydes de manganèse. La teneur en fer est très faible, moins de 0,5 % dans les laitiers actuels.

 

On peut commencer par regarder le diagramme ternaire SiO2-CaO-Al2O3.

La zone A correspond aux températures de fusion les plus basses, autour de 1200°C.

Elle est cependant très riche en silice, ce qui donne au liquide une forte viscosité. Pour le bon fonctionnement du haut-fourneau, il est nécessaire au que les liquides s’écoulent facilement.

On préfère donc la zone B avec une température de fusion plus élevée et une plus forte teneur en chaux.

Les premiers haut-fourneaux (le procédé remonte au moyen-âge) se cantonnaient à la zone A alors que les laitiers modernes contiennent généralement plus de CaO que de SiO2.

 

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Voir à ce sujet un intéressant article de John R. White sur les anciens hauts-fourneaux de l’Ohio :

https://kb.osu.edu/dspace/bitstream/handle/1811/22465/V077N4_186.pdf;jsessionid=845370CD128CA0B3A076749777B75A47?sequence=1

 

La zone intéressante se trouve donc principalement dans le triangle Gehlenite-Anorthite-Pseudowollastonite.

Il faut ensuite tenir compte de l’influence de la magnésie qui va faire apparaître l’akermannite à la place de la gehlenite (qui font toutes deux parties des mélilites) et le diopside à la place de l’anorthite.

Les principaux minéraux susceptibles d’apparaître seront donc les mélilites, l’anorthite, le diopside et la pseudowollastonite à condition que le refroidissement ne soit pas trop rapide. Dans la réalité, les surfusions sont fréquentes avec des phases non cristallisées et des minéraux hors d’équilibre.

 

On trouve dans l’article de J.R. White ce diagramme à 4 constituants qui est en fait une coupe à 15 % d’alumine. Les premiers cristaux à apparaître devraient être la mélilite ou la merwinite pour les laitiers actuels et l’anorthite pour les laitiers anciens.

 

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À Condé sur Iton, dans l’Eure, l’activité métallurgique remonte à l’antiquité. Le vestige le plus connu est l’ancien haut-fourneau. Il était encore en service au début du 19ème siècle, je n’ai pas trouvé de renseignement précis sur la fin de l’activité.

 

Quelques documents sur la sidérurgie en Pays d’Ouche :

Condé-sur-Iton – Le Val, notice rédigée par : Jacques Le Maho, Gilles Deshayes et Jimmy Mouchard

https://adlfi.revues.org/8062

La Grande Métallurgie en Haute-Normandie à la fin du XVIIIe siècle, Guy Richard

http://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_1962_num_12_4_4518

 

On trouve sur le site plusieurs sortes de possibles résidus. Les plus fréquents (ou les plus faciles à repérer?) sont ces cailloux bleu-vert appelés clines.

 

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Des cailloux d’aspect semblable se retrouvent sur divers sites sidérurgiques de la même époque en Pays d’Ouche mais également en Allemagne, en Suède, aux Etats-Unis... Il ne fait guère de doute qu’ils viennent de l’ancien haut-fourneau.

 

http://www.fallingcreekironworks.org/Slagpage.html

https://www.flickr.com/photos/victorious-felines/3484556394

https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Bodestein_hg.jpg

 

Le combustible était le charbon de bois qu’on retrouve en inclusions dans les scories :

 

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Par rapport aux laitiers lorrains contemporains, outre la couleur, la cassure est plus systématiquement vitreuse avec un aspect rubané fréquent.

 

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Nombreuses inclusions micro-cristallines blanches :

 

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Le magnétisme est plus marqué et plus systématique qu’en Lorraine mais semble lié à certaines inclusions :

 

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Les formes cristallines nettes sont rares et limitées à quelques aiguilles à l’intérieur des bulles.

 

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A Saint-Benin-d’Azy, un haut fourneau sidérurgique a été exploité jusqu’en 1887.

http://www.geoforum.fr/topic/33436-obsidienne/?do=findComment&comment=580396

 

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Pour simplifier, on peut considérer qu’à Saint-Benin il y a 3 sortes de scories avec tous les intermédiaires possibles.

- des scories vitreuses, vert olive, rubanées, avec de nombreuses bulles mais très peu d’inclusions ;

- des scories vitreuses d’un noir uniforme sans bulles ni inclusions ;

- des scories noires, sans bulles mais avec de nombreux cristaux blancs isolés ou en amas.

Toutes sont faiblement magnétiques. La densité des échantillons noirs (deuxième type) se situe entre 2,75 et 2,80. En dehors des cristaux blancs, les inclusions sont rares et de très petites dimensions. La dureté est entre le verre et le quartz.

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Il y a 10 heures, gryph58 a dit :

Bonne idée la création de ce sujet !  :super:  Beaucoup trouvent des résidus mais peu s'y intéressent.

Sais tu pourquoi à St Bénin il existe ces 3 types de déchets si différents ?

Bonjour Chantal, l'idée, c'est toi qui me l'as donnée.

Le site a une longue histoire, les installations ont du être reconstruites, les méthodes et les matières premières ont pu évoluer. On peut aussi imaginer la production de plusieurs sortes de scories sur une même période voire une même coulée.

Avec les connaissances et les instruments de l’époque, les réglages restaient très empiriques.

Les scories rubanées avec de nombreuses bulles devaient être très visqueuses et riches en silice.

Les cristaux blancs devaient correspondre à une forte teneur en calcium. À vérifier mais je ne vais pas faire tout analyser.

On note aussi que les scories du 3ème type sont généralement zonées avec un côté qui ressemble fortement au 2ème type. La différence tient peut-être à la vitesse de refroidissement.

 

Il y a 8 heures, Nodarref a dit :

Une belle love scorie :content:

Bonjour Nodarref :super: 

On a les histoires qu’on peut, tout le monde ne travaille pas en Polynésie sur les métaux précieux...

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Les cristaux blancs de St Benin méritent que l’on s’y arrête. Ils forment de curieux groupements que je n’ai vus nulle part ailleurs :

- des paquets de dendrites avec des contours à peu près hexagonaux,

- des peignes bien parallèles qui se raccordent par des virages serrés à des âmes qui évoquent plutôt des gares de triage,

- des amas fibro-radiés...

La forme aciculaire fait plutôt penser à la wollastonite ou à la pseudowollastonite mais on observe une sorte de symétrie hexagonale qui ne colle pas.

Je n’ai pas d’explication à ces bizarreries. La pseudowollastonite monoclinique est un polymorphe de haute température (transition vers 1125°C) de la wollastonite triclinique. Une troisième variante, la parawollastonite également monoclinique, peut se former sous l’effet de contraintes de cisaillement. Peut-être est-ce le résultat d’une croissance imbriquée dans un contexte de refroidissement rapide et de surfusion ?

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Wohaaa !!! Des cristaux de neige et un virus dans des laitiers ! :o  Merci pour ces photos magnifiques et les explications qui vont avec ! :bravo:

 

Chez moi les scories rubanées vertes et noires que je trouve bien jolies ont une seconde vie sus forme de pendentifs.

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Je referme la parenthèse bijoux - déchets et j'attends la suite de ton reportage avec impatience !

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Nous quittons le fer pour le plomb.

Pontgibaud (63) était à la fin du 19ème siècle le principal centre d’extraction de plomb et d’argent en France.

De l’ancienne fonderie, il ne reste plus que la cheminée.

Les scories sont faciles à trouver, il y a même un panneau pour les signaler…

 

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On ne va pas commettre d’infraction, on retrouve le même genre de déchets en divers endroits en accès libre.

Ils ne sont pas facile à repérer : des cailloux noirs au milieu des basaltes, ça ne saute pas aux yeux. Heureusement, la densité de ces scories (3,6 à 3,8) permet de lever les doutes.

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Ils présentent par endroits une croûte vitreuse de quelques mm d’épaisseur et en dessous, une masse noire homogène. Les bulles sont très rares. La couche vitreuse devait correspondre à la surface libre du liquide en début de solidification.

Le magnétisme est généralement assez fort, un peu moins sur la partie vitreuse.

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Au grossissement maximum, sur la partie interne, on ne distingue toujours pas de cristaux nets. L’aspect irrégulier fait néanmoins penser à quelque chose de micro-cristallin.

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L’ extérieur présente parfois un aspect émaillé ou encore de petites rides...

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La croûte vitreuse sur cassure fraîche présente par endroits de belles irisations.

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il y a 31 minutes, gryph58 a dit :

Tes scories irisées sont splendides !

Cette biréfringence peut être provoquée par des contraintes mécaniques induite lors du refroidissement!?

il y a 31 minutes, gryph58 a dit :

Les laitiers ce n'est pas très fertile et ça ne se mélange pas au sol, non ?

Les fortes teneurs en Ca et Mg de certains résidus en font de bon apports agricole, je pence. 

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Il y a 3 heures, gryph58 a dit :

Dans la région de St Bénin d'Azy on en trouve dans presque tous les champs mais j'ai du mal à comprendre en quoi c'est un engrais. Les laitiers ce n'est pas très fertile et ça ne se mélange pas au sol, non ?

Les laitiers de haut-fourneau (les plus courants) n’ont en général pas grand intérêt en tant qu’engrais.

C’était en revanche la principale valorisation des laitiers d’aciérie, et notamment en Lorraine avec un minerai riche en phosphore.

 

http://www.anpea.com/qui-sommes-nous/membres-de-l-anpea/8-qui-sommes-nous/95-la-chambre-syndicale-des-producteurs-de-fertilisants-d-origine-siderurgique-cspfs.html

 

Il faut vraiment voir au cas par cas, en fonction de l’analyse chimique et des besoins locaux de l’agriculture.

 

Il y a 3 heures, gaeldeploeg a dit :

Cette biréfringence peut être provoquée par des contraintes mécaniques induite lors du refroidissement!?

C’est difficile à dire mais je te suis très bien. J’ai pris les photos quelques jours après les avoir. cassés, je ne pense pas qu’ils aient eu le temps de s’oxyder, surtout que ce sont déjà des oxydes.

Les faciès de rupture sont assez curieux avec ces rides serrées, il pourrait bien y avoir des contraintes résiduelles qui traînent.

 

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